Les investisseurs soutiennent la demande d’or en pleine crise économique
Publié le 14.7.2020 à 17:52, modifié le 14.7.2020 à 17:52
Les taux d’intérêt durablement bas et l’incertitude économique sont propices à la hausse des cours de l’or. Et jusqu’ici, l’explosion de la demande pour “l’or papier” a compensé la chute des besoins de la bijouterie. Focus sur cette matière première aussi attrayante que difficile à appréhender. Toutes les données de cet article proviennent du World Gold Council, une organisation professionnelle.
>> L’incertitude économique mondiale et le krach boursier du mois de mars ont donné un gros coup de fouet aux cours de l’or. Le prix de l’once d’or a ainsi repassé la barre de 1.800 dollars en juillet. Il progresse de 16,4% depuis le début de l’année (vs -16% pour le CAC40).
>> Les investisseurs reviennent d’autant plus fort sur cette traditionnelle valeur refuge que les taux d’intérêt sont amenés à rester durablement bas. La crise économique provoquée par le coronavirus a pris de court les grandes banques centrales, obligées de maintenir leur taux à des niveaux très bas, voire nuls parfois.
Pourquoi les taux bas profitent à l’or ? Lorsque les taux d’intérêt sont faibles, les taux d’intérêt réels (moins le taux d’inflation) sont encore plus faibles, voire négatifs. L’or, qui ne verse pas de rendement, est donc privilégié par les investisseurs qui veulent se protéger de l’inflation.
>> Le cours de l’or reste soumis à de nombreuses forces qui peuvent parfois s’inverser. Les multiples usages très différents de ce métal précieux en font une matière première particulièrement complexe à appréhender, certainement la plus complexe. L’or sert de monnaie d’échange, de réserve de valeur, il sert aussi à fabriquer des bijoux, il entre dans la composition de produits sophistiqués…
L’offre s’appuie essentiellement sur la production minière
>> 3.534 tonnes d’or ont été extraites en 2019. La Chine, la Russie et l’Australie assurent 30% de la production mondiale (voir infographie). La production globale progresse régulièrement, elle s’est appréciée de 26% en 10 ans.
>> La deuxième source importante d’or est le recyclage, qui représente environ 27% de l’offre mondiale. La production d’or recyclé a atteint 1.311 tonnes en 2019.
4.812,4 tonnes d’or = l’offre totale en 2019
La bijouterie est le pilier de la demande mondiale
>> Chaque année, environ 50% de la demande mondiale d’or vient de la bijouterie. En 2019, 2.118,6 tonnes ont été utilisées pour la fabrication de bijoux, 638 tonnes en Chine et 545 en Inde.
>> L’usage industriel (électronique, dentaire…) se limite à quelques centaines de tonnes chaque année (327 tonnes en 2019). L’acquisition d’or par les banques centrales et autres institutions financières est plus conséquente (648 tonnes en 2019) mais leurs besoins sont irréguliers.
>> L’or pour l’investissement représente un peu moins de 30% de la demande mondiale (1.275 tonnes en 2019). Cette catégorie très large englobe l’or en barre, les pièces, les médailles et l’or papier.
Repère : on appelle “or papier” les produits financiers qui permettent l’acquisition d’or sans détention physique du produit. Les ETF (exchange traded fund), aussi appelés trackers, sont des produits boursiers les plus communs pour acheter de l’or. De la même manière, on parle de “pierre papier” pour l’investissement immobilier dématérialisé (via les SCPI par exemple).
Les ETF indexés sur l’or soutiennent le marché depuis un an
>> En 2019, la demande d’or pour la bijouterie et, dans une moindre mesure, pour l’usage industriel a baissé. Mais la demande en provenance des investisseurs a fortement progressé du fait de l’explosion des besoins en ETF. Et la crise a accentué encore ce phénomène début 2020.
>> Avec la crise du coronavirus, la demande de la bijouterie s’est effondrée (-39% au premier trimestre) mais celle venant des investisseurs a été multipliée par 7.
>> Les chiffres disponibles pour les ETF font état d’un flux de 734 tonnes pour les 6 premiers mois de l’année, largement supérieur au record annuel de 2009 de 646 tonnes. L’engouement pour l’or papier s’est encore renforcé.
Et maintenant ? Le redémarrage de certaines activités grâce au déconfinement n’a pas modifié les perspectives mondiales qui sont médiocres. La visibilité est toujours réduite avec la crainte d’une deuxième vague et même les premiers reconfinement localisés. Les banques centrales ont décidé de maintenir les taux bas pour soutenir l’activité et cette situation semble bien partie pour durer. Les éléments sont donc réunis pour soutenir le cours de l’or qui pourrait alors dépasser son précédent record (1.875 dollars l’once en septembre 2011).
L’info en plus : 1 once d’or pèse 31,1 grammes.
Au sujet des matières premières : Comment le prix du pétrole est tombé sous zéro